1 100 kilomètres de chemins
Plus de 1 100 kilomètres de chemins ruraux sillonnent le territoire du Grand Site de France. Ils constituent aujourd’hui un bien commun à se réapproprier et un patrimoine à réveiller.
Avec ses 2,7 km de chemins/km², la densité du réseau de chemins ruraux du Grand Site de France est exceptionnelle. Elle s’explique par la conjugaison de deux phénomènes : la dispersion historique de l’habitat en Morvan, qui a conduit à multiplier les connexions entre les lieux habités, et l’absence de remembrement agricole, qui a permis aux chemins ruraux de perdurer à travers les âges. Souvent désaffectés, leur tracé est néanmoins encore marqué dans le paysage, fossilisé sous le couvert forestier ou dans les broussailles.
Sur le mont Beuvray, une magnifique hêtraie peuplée de queules, ces jeunes arbres jadis tressés par les paysans pour délimiter les parcelles agricoles.
1 100 km de chemins ruraux
Un réseau exceptionnellement dense
Le réseau de chemins ruraux charpente et hiérarchise les entités paysagères. Ce faisant, il donne à voir l’appropriation du territoire par les communautés villageoises ; il est un révélateur spatial et social. Le chemin est associé à un petit patrimoine diversifié – murs en pierres sèches qui le délimitent, franchissements, fontaines, calvaires. Il est aussi le témoin d’anciens savoir-faire agricoles et d’usages des ressources de proximité : haies plessées, trognes, arbres fruitiers (châtaigniers, noyers, pommiers…), captages de sources, etc. Il assure aussi des services environnementaux : ses haies protègent de l’érosion, enrichissent les sols, améliorent la qualité de l’eau, tempèrent le climat ; maillon essentiel de la préservation de la biodiversité, elles offrent un refuge à de nombreuses espèces et jouent un rôle de corridor écologique. Le chemin offre également des aménités : c’est un lieu de promenade apprécié pour son ambiance nature apaisante et pour les belvédères qu’il offre sur le paysage.
Un bien commun à se réapproprier
Un patrimoine à réveiller
Les chemins ruraux sont la propriété des communes. Depuis 2017, ce patrimoine fait l’objet d’une étude et d’un programme spécifique de mise en valeur à l’échelle des douze communes du Grand Site de France. Lors de « Journées participatives paysage et patrimoine », des séances de travail en marchant avec les habitants ont permis de révéler que ces chemins ruraux constituent un fort motif d’attachement au territoire. Il s’agit donc d’un véritable bien commun dont la réappropriation et la réactivation sont un moteur de la démarche Grand Site de France. La population ayant chuté d’environ 80 % depuis le XIXe siècle, nombre de lieux habités ont été désertés puis regagnés par la forêt, conduisant à l’abandon d’une partie de ce réseau. Les chemins encore praticables sont de surcroît souvent endommagés par les engins agricoles et forestiers modernes, du fait de leur gabarit inadapté. La loi du 22 juillet 1983 a instauré un statut de protection des chemins ruraux avec leur inscription possible aux Plans Départementaux des Itinéraires de Promenade et de Randonnée (PDIPR). Néanmoins, leur préservation est menacée par le risque d’accaparement par des riverains, tandis que les communes ont la possibilité de les céder à des tiers, ce qui ne saurait être fait sans un examen approfondi de leur intérêt pour la collectivité.
Un inventaire patrimonial
La mise en place de démarches participatives
L’analyse des cartes existantes, notamment des plans cadastraux depuis leur origine (première moitié du XIXe siècle), mais aussi l'utilisation de la géomatique et d’un système d’information géographique (SIG), sont nécessaires pour constituer une base de données fiable permettant une meilleure gestion des chemins et une diffusion de la connaissance de ce patrimoine commun. Des travaux universitaires ont permis de mettre au point et de valider un protocole d’inventaire et de caractérisation permettant la saisie de données sur le terrain avec une tablette via l’application QFIELD et leur versement automatique sur un SIG dédié. Des habitants et élus des 12 communes du Grand Site de France ont été formés à cet outil et se mobilisent au sein d’un groupe de travail pour arpenter les chemins en les répertoriant sur une application dédiée. Ce projet offre aux élus un outil de gestion participative permettant une réappropriation de ce « bien commun » par une véritable communauté patrimoniale constituée d'habitants, usagers ou simple curieux venus découvrir ces lieux.
Couverture d'un carnet d'arpentage
Les carnets d’arpentage du Grand Site de France
Une valorisation sensible des chemins
La reconnaissance de la valeur patrimoniale des chemins a donné lieu à la création d’une collection de « carnets d’arpentage » (mot latin d’origine gauloise arepennis, qui désigne une mesure agraire) pilotée par la paysagiste et illustratrice Ninon Bonzom. Ces carnets rendent compte de façon sensible et délicate de balades au fil des chemins à la découverte du patrimoine des différentes communes et traduisent l’attachement des habitants à leur territoire. Ils retracent et illustrent les espaces et paysages parcourus, vécus, aimés par les habitants. Pour élaborer ses carnets, Ninon Bonzom – secondée par deux autres paysagistes, Lily Wanat et Emilie Sauveur – arpente les chemins dans le cadre de résidences artistiques, avec les élus et les habitants.
Sept carnets ont été édités à ce jour - Villapourçon, Glux-en-Glenne, Larochemillay, St-Prix, St-Léger-sous-Beuvray, Arleuf et Fâchin - et 5 autres sont à venir. La collection est disponible en série sérigraphiée limitée.
Le programme européen INCULTUM
Réveiller le patrimoine commun des chemins ruraux
Depuis 2021 et pour 3 ans, BIBRACTE est engagé dans le programme européen de recherche-action INCULTUM. Il s'agit, en collaboration avec les partenaires de la démarche Grand Site de France, les acteurs locaux du tourisme ainsi que la communauté patrimoniale constituée autour des chemins ruraux, de développer un projet de tourisme culturel durable alliant loisirs de pleine nature, découverte du patrimoine et activités culturelles.